La Fille aux yeux d’or d’Honoré de Balzac

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Mieux vaut tard que jamais : on l’a, ce roman promis dans la préface de Ferragus, premier tome de l’Histoire des Treize que vient clore la Fille aux yeux d’or. Certes, les Treize en question restent encore une fois en retrait, mais admettons, c’est une société vraiment très, très secrète. Peu importe : la Fille aux Yeux d’or nous propulse dans une intrigue follement romanesque dont le héros est un personnage que l’on croisera régulièrement dans la Comédie Humaine, Henri de Marsay. Frappé par la foudre lorsqu’il croise une mystérieuse inconnue aux yeux de chat ou de serpent, de Marsay va tout entreprendre pour l’identifier puis la faire sienne, au péril de sa vie peut-être puisque cette fille aux yeux d’or est gardée comme un précieux trésor dans ce qui semble être une forteresse imprenable au coeur même de Paris. 

fille aux yeux d'orIl faut l’avouer, le plan de la Fille aux yeux d’or n’est pas mieux fichu que celui des deux romans précédents. L’incipit est peut-être un des plus ratés qu’ait écrits Balzac, proche de celui de Ferragus dans l’esprit mais frappé d’une apathie inexplicable. Le virus reprendra Balzac de temps à autre, aux moments où l’intrigue mal fagotée de son roman l’embarrassera le plus. On lui pardonne : malgré ses légères incohérences (et un dénouement proche du ridicule), la Fille aux yeux d’or est bien le plus emballant des volumes de l’Histoire des Treize. Avant tout parce que le réalisme fantastique qui transparaissait dans Ferragus se déploie ici complètement, teinté d’un orientalisme que je n’avais jamais remarqué chez Balzac. C’est d’ailleurs son exotisme qui donne l’essentiel de son charme à Paquita, la fameuse fille aux yeux d’or, qui serait sans cela un personnage assez falot. Il y a là, également, quelques descriptions de lieux bien éloignés des murs ternes de la pension Vauquer, tout parés d’or, d’ivoire et de velours et nimbés d’encens… Une ambiance qu’on peut retrouver facilement chez des contemporains de Balzac, mais qu’on aura du mal à discerner chez les Grandet ou les Nucingen.

Tout cela ne serait rien si ce roman ne contenait un portrait réjouissant, celui d’Henri de Marsay, jeune loup ambitieux et sans scrupules qui annonce Rastignac et Lucien de Rubempré. Lui dont le pouvoir politique confine généralement à une mystérieuse toute-puissance (dans les Illusions Perdues ou Une ténébreuse affaire par exemple) apparaît ici sous un autre jour. Certes, ses origines, qui font de lui un noble bâtard, préservent une part de mystère, mais il n’y a plus rien d’énigmatique dans son omnipotence – qui lui vient simplement de sa richesse. C’est d’ailleurs la part la plus amusante de cette Fille aux yeux d’or : vous vouliez connaître l’origine du pouvoir des Treize, semble nous demander Balzac ? C’est simple : il s’agit juste d’une question d’argent. Comme toujours, aurait-il pu ajouter.

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