David en a assez.
On ne le prend pas assez au sérieux.
Avant, il écrivait des bluettes.
Maintenant, il écrit des livres sur le mal de vivre.
Avec un peu d’espoir à la fin quand même.
Ca ne suffit pas.
Il a pourtant des choses en lui.
Des choses sombres.
La mort.
Le deuil.
La douleur.
L’amour, ça va bien cinq minutes.
Il peut avoir du style aussi.
S’il le veut.
Il écrirait des choses comme :
Elle est belle, avec de longs cheveux noirs comme des promesses.
Ce serait beau.
On lui dirait qu’il est un grand écrivain.
Finalement.
Et puis il reviendrait à la ligne après chaque phrase.
Courtes, les phrases.
Ce serait beau.
Ce serait comme un poème.
En prose.
On y prend vite goût.
Aux retours.
A la ligne.
Il poserait des questions parfois.
Que cherche-t-elle ?
Qui est-elle ?
Ca ferait réfléchir.
Il a un sujet, en plus.
Charlotte.
Charlotte Salomon.
Elle est morte à Auschwitz.
Ca force le respect.
Et puis sa mère et sa tante se sont suicidées.
C’est super.
Enfin, pas super, mais tu vois quoi.
Ca sera émouvant, l’écrivain qui part à la recherche de ses propres blessures en enquêtant sur Charlotte.
Le temps qui passe, le retour du même, le devoir de mémoire.
Et toutes ces choses.
D’ailleurs ça tombe bien, il a fait allemand LV1.
Ce n’est pas très gentil de se moquer.
David est certainement sincère.
Il s’empare de ce sujet avec humilité.
Charlotte Salomon le fascine.
Avec ses cheveux noirs comme des promesses.
Mais comment prendre tout ça au sérieux ?
Avec ce style si affecté.
Qui agit comme un épais brouillard.
Qui empêche tout à fait de pénétrer l’histoire de Charlotte.
Qui fait ressembler le IIIe Reich à un théâtre d’ombres.
Mais voudrait pourtant avoir la puissance lyrique de mille Si c’est un homme.
C’est triste.
Ce n’est pas encore pour cette fois.
Quel courage
D’en être venu à bout.
J’ai essayé, mais je ne peux pas.
Trop lourd, trop lent, trop tout pourtant.
Joli article, Professeur !
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Merci ! Et, oui, cette année mon abnégation et ma ténacité n’auront pas de limites en ce qui concerne les premiers sélectionnés du Goncourt… Je les aurai ! Même si certains ne sont déjà plus en lice, avant même que j’aie eu le temps de les lire.
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Bel article, Professeur, et culotté ! 🙂
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Merci Polina 😉 Je dois dire que pour une fois j’ai hésité à être moqueur, car je suis certain que la démarche de Foenkinos est au fond très sensible. Mais bon, quand ça ne marche pas, ça ne marche pas…
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Bravo pour cette chronique adaptée à la forme du roman. Par contre, j’ai un peu perdu l’envie de lire ce livre acheté il y a peu de temps…
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Si ça peut te motiver, sache qu’au moins ça se lit très vite 😉
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Je ne suis, évidemment, pas d’accord du tout (du coup je note le Duteurtre dans ma tête, parce que si ça se trouve, vu comme nos goûts divergent, si ça se trouve…)
bel exercice de style en tout cas !
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C’est vrai qu’on n’est pas souvent d’accord en ce moment… Mais ce n’est pas une raison pour lire le torchon de Duteurtre 😉
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Bel article même si moi ce roman me tente !
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Très franchement, ayant tout de même une certaine sympathie pour Foenkinos dont je n’ai pourtant jamais aimé un seul roman, j’espérais mieux – le sujet m’intéressait d’ailleurs. Mais dès le début, ce style pataud m’a refroidi…
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